
Les transactions mondiales de fusion-acquisition ont reculé de 18 % en 2023, selon Refinitiv, après une année 2022 déjà marquée par une baisse. Pourtant, plusieurs mégadeals inattendus ont déjoué les prévisions. Les conditions de marché, longtemps jugées défavorables, n’ont pas empêché certains secteurs de battre des records d’opérations stratégiques.
En 2024, la remontée progressive des valorisations et la détente relative des taux d’intérêt ouvrent la voie à de nouvelles dynamiques. Les acteurs du capital-investissement, dotés de liquidités considérables, guettent les signaux d’un possible rebond pour 2025.
Plan de l'article
Où en est le marché des fusions et acquisitions à l’aube de 2025 ?
Depuis deux ans, le marché des fusions et acquisitions avance à pas comptés. Après la chute brutale de 2023, le début de 2024 n’a pas inversé la tendance : l’attente domine, l’appétit pour le risque semble anesthésié. Les banques centrales maintiennent la pression sur les taux, ce qui complique le financement et pèse sur le rythme des transactions. Refinitiv chiffre le volume mondial des opérations à peine à 1 300 milliards de dollars sur six mois, loin des records passés.
Pour mieux saisir les spécificités régionales, voici les principaux constats :
- En Europe, le marché reste en retrait, freiné par l’incertitude économique et les turbulences politiques. La France suit la même pente, même si certains pans, énergie, santé, infrastructures, affichent une capacité à résister.
- Malgré tout, la croissance externe demeure une stratégie convoitée, en particulier dans l’industrie, la tech et la santé.
Les perspectives n’offrent aucune garantie de redressement rapide. Les investisseurs, échaudés par les secousses et la cherté du capital, surveillent de près l’évolution des taux avant de relancer des dossiers en suspens. Le private equity trône sur un matelas inédit de liquidités et pourrait devenir l’un des moteurs du redémarrage. Mais il reste un sérieux décalage entre les attentes des vendeurs, souvent figés sur les prix d’avant crise, et les exigences de décote des acheteurs. Le retour des grandes opérations dépendra d’un alignement rare des facteurs de marché dans les prochains mois.
Facteurs clés : ce qui pourrait relancer la dynamique cette année
2025 s’avance comme une année charnière pour les fusions et acquisitions. Plusieurs éléments pourraient redonner de l’élan à une mécanique enrayée. Premier déclencheur : l’évolution des taux d’intérêt. Leur stabilisation, voire leur baisse, pourrait relancer les financements et encourager les acheteurs à sortir de leur réserve. Les équipes de private equity, toujours sur des réserves de cash importantes, surveillent chaque signal favorable. Si le crédit se détend, les opérations reportées pourraient revenir sur le devant de la scène.
La suite dépend aussi de la dissipation des incertitudes politiques. Entre la dissolution de l’Assemblée nationale en France, les élections américaines et l’agenda européen, la visibilité reste faible. Mais une normalisation institutionnelle offrirait un terrain de jeu plus lisible pour les investisseurs.
Le facteur technologique bouscule également l’ordre établi. L’essor de l’intelligence artificielle générative aiguise les stratégies d’acquisition. Les acteurs cherchent la taille, l’innovation, la maîtrise de compétences clés, quitte à multiplier les acquisitions ciblées. La croissance externe dans la tech, mais aussi dans d’autres secteurs, s’intensifie face à la course à l’innovation.
Face à une concurrence exacerbée, les entreprises accélèrent leur transformation. La croissance externe devient un réflexe pour pallier la stagnation organique. Santé, énergie, infrastructures : ces secteurs pourraient bénéficier d’un terrain d’entente sur les prix, à mesure que les valorisations s’ajustent.
Quels secteurs et régions pourraient tirer leur épingle du jeu ?
La carte des fusions et acquisitions risque d’être redessinée en 2025. Les secteurs technologiques tiennent toujours le haut du pavé. L’engouement pour l’intelligence artificielle et la digitalisation place la tech au cœur des stratégies : éditeurs de logiciels, infrastructures cloud, cybersécurité, tous attirent les regards et voient leur valeur grimper.
Le mouvement se poursuit dans les life sciences et la santé. Le vieillissement de la population, la pression sur les systèmes de soins, poussent à la recherche de relais de croissance via des opérations externes. Groupes pharmaceutiques, biotechs, laboratoires multiplient les transactions pour accélérer l’innovation et s’affirmer sur les marchés matures.
Sur le plan géographique, l’Europe continue d’attirer, malgré une conjoncture mouvementée. En France, le tissu dense de PME et d’ETI séduit les fonds de private equity, surtout dans l’industrie et les infrastructures. Les investisseurs anglo-saxons ne restent pas en retrait, profitant d’un euro faible et de cibles attractives sur le continent.
Voici les tendances sectorielles les plus visibles :
- Technologie : consolidation en accélération, valorisations qui tiennent le choc
- Santé, life sciences : volumes importants de transactions, quête de nouvelles sources de croissance
- Industrie : mouvements stratégiques, intérêt marqué des fonds paneuropéens
La recomposition sectorielle va de pair avec la montée des fast growing companies : ces entreprises à croissance rapide, qui deviennent des cibles privilégiées pour les investisseurs cherchant à diversifier leur portefeuille. Les fusions-acquisitions façonneront ainsi de nouveaux équilibres sur la scène européenne.
Décrypter les opportunités à saisir pour les acteurs en veille
Le marché des fusions et acquisitions s’oriente vers de nouveaux repères. Ceux qui restent vigilants observent l’écosystème à la loupe, à l’affût du moindre indice. Le secteur des life sciences constitue un terrain propice : porté par la demande mondiale et les percées technologiques, il attire les fonds en quête de relais extérieurs. Les alliances se multiplient, les joint-ventures gagnent du terrain, et les investisseurs ciblent des plateformes capables d’intégrer rapidement les nouveaux outils numériques.
L’intelligence artificielle s’impose comme point de bascule. Les entreprises qui réussissent à l’insérer dans leur chaîne de valeur attirent naturellement les capitaux. La frontière s’estompe entre consolidation sectorielle et diversification : les groupes industriels, confrontés à la digitalisation, multiplient les participations ciblées. La tendance s’observe par une accélération des acquisitions stratégiques, visant à sécuriser compétences technologiques et talents rares.
Le private equity affine sa méthode. Les fonds privilégient l’accompagnement opérationnel et investissent dans les entreprises capables de s’adapter rapidement. On repère quelques segments particulièrement dynamiques :
- Convergence entre santé et numérique, avec l’apparition de nouveaux modèles hybrides
- Industries où les besoins en capitaux sont élevés, et où atteindre une taille critique devient déterminant
- Plateformes de services capables de croître par acquisitions et alliances stratégiques
Dans cet environnement volatil, la sélectivité s’impose. Les meilleures opportunités sont réservées aux actifs capables de traverser les cycles, portés par leur capacité d’innovation et la solidité de leur modèle économique. Pour ceux qui sauront lire entre les lignes, 2025 pourrait bien transformer l’attentisme en terrain de conquête.