
À partir de l’exercice 2024, la publication d’informations extra-financières devient obligatoire pour environ 50 000 entreprises européennes, contre 11 000 auparavant. Les dirigeants sont désormais responsables pénalement en cas de fausse déclaration ou d’omission dans le reporting extra-financier.
Les normes européennes ESRS imposent une granularité inédite dans la collecte des données sur les impacts environnementaux, sociaux et de gouvernance. Désormais, l’expert-comptable ne se limite plus à certifier les comptes : il atteste aussi de la sincérité et de la cohérence des indicateurs extra-financiers exigés par la CSRD.
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Plan de l'article
Durabilité et comptabilité : un nouveau cadre réglementaire en pleine évolution
La directive CSRD rebat les cartes du reporting extra-financier. Les entreprises n’ont plus la main sur le format ou la portée de leurs publications : elles doivent toutes adopter les normes ESRS, élaborées sous l’impulsion de la Commission européenne. Les sièges des grandes entreprises, de Paris à Berlin, doivent désormais répondre à un cahier des charges unique, pensé à Bruxelles pour garantir la comparabilité, la fiabilité et la transparence des informations sur la durabilité.
Au cœur du dispositif, la sustainability reporting directive exige des données précises sur les impacts, les risques, mais aussi les opportunités liés à la transition écologique et sociale. Les informations sur le climat, la biodiversité ou la gestion des droits humains entrent dans le champ des états financiers, bouleversant l’exercice comptable traditionnel. La corporate sustainability reporting n’est plus une option ou une vitrine : c’est une obligation légale, surveillée de près par l’Autorité des Normes Comptables. Audit systématique, contrôle externe, sanctions en cas de manquement : la pression réglementaire monte d’un cran.
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Face à cette transformation, impossible de s’en tenir aux anciens outils. Les directions financières doivent revoir leurs logiciels, leurs flux de collecte, jusqu’à la façon même dont elles structurent les données. Les exigences de granularité rendent le pilotage plus complexe, mais aussi plus stratégique. Pour rester dans la course, les entreprises s’appuient sur des cadres internationaux tels que IFRS, garantissant l’interopérabilité et la qualité des données extra-financières. Loin d’être un simple fardeau, ce nouveau paradigme peut devenir un moteur de création de valeur, à condition de savoir anticiper les risques et d’embrasser véritablement la transition imposée par l’Union européenne.
Quelles obligations concrètes pour les entreprises et leurs partenaires ?
La directive CSRD ne se limite pas à un simple toilettage du reporting : elle fixe de nouveaux seuils qui engagent toute entreprise de plus de 250 salariés, réalisant un chiffre d’affaires dépassant 40 millions d’euros ou affichant un total de bilan supérieur à 20 millions. Les filiales ne peuvent plus rester dans l’ombre : dès lors que la maison mère franchit ces seuils, l’ensemble du groupe doit s’aligner.
Le champ du reporting s’élargit nettement : émissions de gaz à effet de serre, respect des droits humains, analyse de la chaîne d’approvisionnement, dispositifs de gouvernance… Les entreprises doivent documenter et publier ces informations, selon la logique de la double matérialité : à la fois l’impact de l’entreprise sur son environnement et la façon dont elle subit les évolutions sociétales ou climatiques.
Pour y voir plus clair, voici les nouvelles exigences qui s’imposent désormais :
- Présentation conjointe des informations financières et extra-financières dans le rapport de gestion
- Contrôle obligatoire par un organisme tiers indépendant ou un commissaire aux comptes
- Mise à disposition d’un bilan carbone exhaustif, incluant le scope 3 pour les structures d’envergure
Les partenaires des entreprises, fournisseurs, sous-traitants, investisseurs, sont à leur tour concernés. Les grands groupes exigent désormais des preuves tangibles sur les engagements RSE de chaque maillon de la chaîne. C’est tout l’écosystème qui doit jouer la carte de la transparence et se préparer à des contrôles plus fréquents. Résultat : la collecte de données crédibles devient un enjeu partagé, tandis que les discussions sur les pratiques environnementales, sociales et de gouvernance s’intensifient dans toutes les directions.
L’expert-comptable, acteur clé pour transformer la conformité en levier RSE
Le cabinet d’expertise comptable voit son rôle transformé. Il ne s’agit plus seulement d’établir des comptes annuels, mais de guider les entreprises dans la jungle des normes européennes, à commencer par la directive CSRD et les exigences des sustainability reporting standards (ESRS). L’expert-comptable devient le chef d’orchestre de la conformité, mais aussi un stratège de la durabilité.
Sa mission : rendre lisible et crédible l’information extra-financière, conseiller le conseil d’administration, sécuriser les données sur la responsabilité sociétale de l’entreprise. Il analyse la matérialité des risques et des opportunités liés à la transformation écologique, conseille sur la collecte et la fiabilisation des données, prépare l’entreprise aux attentes des commissaires aux comptes et des régulateurs. L’analyse du cycle de vie, la traçabilité des émissions de gaz à effet de serre, la gestion des indicateurs RSE : chaque étape suppose expertise, méthode et anticipation.
Mais la mission du cabinet va au-delà : il doit aussi former ses équipes, intégrer les nouvelles normes dans ses outils et ses réflexes, placer la durabilité au cœur de son quotidien. L’audit ne se limite plus à un contrôle formel ; il révèle les forces et faiblesses des pratiques RSE, et ouvre la voie à des axes de progression concrets. Partout, les experts-comptables prennent leur place de partenaires de la transformation, capables de traduire les textes européens en solutions concrètes et en leviers d’action pour les dirigeants.
Voici comment ces professionnels accompagnent la mutation des entreprises :
- Assistance à la collecte et à la sécurisation des données RSE
- Conseil sur la structuration des reportings de durabilité
- Préparation à l’audit et anticipation des contrôles à venir
La profession vit une métamorphose rapide. Les entreprises veulent désormais un expert-comptable qui dépasse le rôle de vigie, et devienne le complice engagé de leur stratégie responsable. Le terrain de jeu s’est élargi, les enjeux aussi. Désormais, l’avenir se dessine à l’intersection de la conformité et de l’engagement.